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GAEC LA BELLE ESTIVE

Fromage

Il y a parfois dans la vie des rencontres qui vous offrent un moment unique, précieux et suspendu dans le temps. Frédéric Génot, éleveur de brebis, fait partie de ces rencontres singulières. Sa philosophie de vie nous rappelle que bien souvent les choses sont simples et qu’il nous faut aller à l’essentiel.

Son maître mot : aller vers soi. C’est cette connexion à lui-même qui l’a conduit au métier d’éleveur de brebis, de berger et de fromager et pour notre plus grand plaisir, à Prat-de -Bouc, une montagne située au cœur du Parc naturel régional des Volcans d’Auvergne sur le volcan Cantalien.

Rencontre avec un éleveur en phase avec ses valeurs de respect de la nature, du vivant, « du Tout » auquel nous appartenons tous, un éleveur empreint de sagesse qui nous délivre de beaux messages. A méditer


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Pouvez-vous me parler de votre parcours ?

Avant d’exercer mon métier, j’ai été éducateur à l’environnement au Parc naturel régional de la Brenne pour un CPIE (Centre Permanent d’Initiation à l’Environnement). J’ai été également chargé de mission Milieu naturel et pastoralisme pour le Grand Cahors. Puis, durant l’été, je partais en estives dans les Pyrénées, en tant que berger salarié. Ensuite, j’ai eu envie d’aller un peu plus loin en m'installant paysan et berger, sur la ferme de mes grands-parents. Nous sommes aujourd'hui installés en GAEC avec ma femme Agnès.


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Qu’est-ce qui vous a attiré dans le métier d’éleveur de brebis et de berger ?

C’est parti d’une rencontre avec un berger dans les Pyrénées quand j’encadrais un camp itinérant pour adolescents. J’aimais bien le ressentit du métier de berger qui représente la symbiose entre l’élevage et le milieu naturel. C’est un bel équilibre.


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C’est cet équilibre-là qui vous a fait dire que cela vous correspondait ?

C’est assez profond, peu de métiers permettent de vivre dans la montagne pendant des mois. C’est un privilège d’habiter la montagne, c’est une autre dimension. Je vis à son rythme, par tous les temps, je fais « avec elle ». Cela permet de se connecter à soi-même parce qu’on est lié à la nature. Je ne me suis pas conditionné pour être connecté avec cette nature, j’ai simplement été là où ça me correspond.


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Quelles races de brebis élevez-vous ?

Nous élevons des brebis Basco-Béarnaise. C’est une race de montagne transhumante des Pyrénées. Ce sont de bonnes marcheuses qui s’adaptent bien au changement de territoire. Elles sont résistantes et possèdent une laine qui les protège des intempéries. Ce ne sont pas des brebis qui produisent beaucoup de lait mais leur lait est riche en matière grasse ce qui permet de proposer un fromage au goût très fruité.


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Quel type de fromage fabriquez-vous ?

Nous fabriquons des tomettes qui ont un affinage au minimum d’un mois et demi et des tommes d'environ 4,5 kg qui sont affinées au minimum trois mois.


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Pourquoi avoir choisi le Cantal pour transhumer ?

Nous avons transhumé dans les Pyrénées pendant douze ans et nous souhaitions nous rapprocher de notre lieu de vie dans le Lot. J’ai découvert Prat de Bouc en me promenant. J’ai trouvé cet endroit très beau. J’ai appelé la Commune d'Albepierre-Bredons pour savoir s’il y avait des espaces non pâturés et il se trouve qu’un éleveur de brebis partait justement à la retraite. Il y avait une vingtaine d’hectares disponibles. De plus il y avait un buron et une cave d’affinage à Prat de Bouc qui ne servait pas. Les brebis pâturent également une autre zone d'estive en complément de vaches au col pendant l'été. Il y avait tout ce qui fallait.


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Vous êtes arrivé au bon moment, c’est une chance !

C’est tout un contexte qui a fait que cela a fonctionné. Il n’y a pas de hasard, c’est un état d’être. Quand on est soi-même, les choses se font beaucoup plus simplement. Nous avons eu des élus ouverts d’esprit qui ont accueilli « l’étranger » et qui nous ont laissé la possibilité de mettre en place notre projet. Quand tout le monde met de côté ses peurs et ses conditionnements, on se sent assez libre de mettre en place de nouveaux projets. Cela crée un engouement. Cette énergie qui se dégage de tout ça, rayonne aussi sur les gens du village. Ça donne du sens à ce pays de refaire un fromage dans un ancien buron.


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Le Cantal est plutôt un territoire d’éleveurs de bovins, les prairies conviennent-elles aux brebis ?

Ce n’est pas dans les mœurs auvergnates, mais les brebis ne mangent pas comme les vaches. Elles vont entretenir différemment les espaces. Les petits ruminants vont aller chercher les herbes fines que les vaches ne pourraient pas manger. Dans les Pyrénées, ils disent qu’il faut trois dents pour les prairies, les vaches, les chevaux et les brebis. Et puis, la fumure des brebis n’est pas la même que la fumure des vaches, c’est bénéfique pour la richesse et l’équilibre des prairies et donc pour la préservation de la biodiversité. Les brebis ne représentent pas une concurrence mais au contraire c’est un complément.


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Aujourd’hui, on sait que l’une des clés pour d’adapter au changement climatique, c’est de pratiquer une agriculture paysanne. Quel est votre regard par rapport à tout ça ?

Il y a cette situation du changement climatique qui est dû certainement à l’humain. Nous pouvons faire notre part de travail et participer à cette transition. Bien que le métier de berger soit très ancien, il est aujourd’hui très actuel. L’élevage extensif est une pratique très résiliente tout comme fabriquer du fromage dans un ancien buron.


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On revient au bon sens paysan?

On touche du doigt le bon sens. En fait, les choses se mettent en place toutes seules. Je ne me dis pas : « je vais faire du bon sens ». Si j’avais cette approche, cela ne marcherait pas longtemps. Les brebis sont là, elles mangent l’herbe des prairies, je les traits le matin à la main, Nous fabriquons et affinons nos fromages au buron et les clients viennent acheter ces fromages sur place. En fait, les choses sont assez simples. Il suffit d’aller à l’essentiel dans nos choix.


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Aller vers la simplicité et à l’essentiel, c’est ce qui donne du sens à votre métier ?

Il y a deux sens dans le mot « sens », le sens qu’on donne aux choses et le sens de la direction. On va « vers où » ? Un « vers où » c’est un « verrou ». Quand on a trouvé la clé, le « vers où-» devient « ouvert » Une fois qu’on a déverrouillée son verrou personnel, on est ouvert. Il faut trouver la clé mais en réalité, il ne faut pas la chercher, il faut aller vers soi. On se sent ensuite proche de Soi et de chaque être humain.


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Cette philosophie de vie va au-delà d’un choix de métier ?

La quête a quelque chose de tellement illusoire, on cherche toujours quelque chose d’autre, de plus, de mieux ou de différent et je pense que c’est une réelle erreur. On cherche quelque chose dans l’avenir sauf que psychologiquement l’avenir n’existe pas. Le seul espace de vie c’est le présent. Nous sommes aujourd’hui ce que nous serons demain. Si on se dit : demain je serai meilleur, pourquoi pas, mais le seul moment où on peut le changer c’est maintenant. Le changement ne peut être que dans l’instant. Ce sont des réflexions à intégrer, après, la conscience fait le travail toute seule. Il faut observer ses propres conditionnements car la conscience elle, elle est hors du conditionnement.


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Etre ici et maintenant, ne pas vivre dans le passé ni dans le futur, c’est difficile parce que l’être humain a besoin de projection ?

Techniquement, nous avons besoin d’avoir une projection, des objectifs de vie mais psychologiquement le futur n’existe pas, c’est donc très limité. C’est la perception de l’instant qui existe dans la vie, c’est celui-là, il n’y en a pas d’autre. C’est arrêter de vivre dans le passé. Par exemple, je fais un métier très ancien, traire à la main est un des gestes premiers de l’homme mais je le fais aujourd’hui. La tradition est intéressante dans le geste, le savoir, l'expérience qui nous fait apprendre ; quand la tradition devient militante, il faut faire attention...c'est de l'identification au passé.


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Qu’est-ce qui vous a amené à cette réflexion-là ?

C’est la prise de conscience des mécanismes de nos pensées, de nos conditionnements, de nos croyances, qui font l'identité de ce que nous sommes. Mais notre être profond c’est bien plus que cela ; Il est à découvrir ! « Connais-toi toi-même » est certainement une phrase à méditer.


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C’est une forme de lâcher prise ?

Le lâcher prise, c’est accueillir ce qui nous arrive. Ne pas être en résistance tout le temps fait qu’on est davantage dans la perception directe des choses. Mais par contre, le lâcher- prise ne signifie pas ne rien faire, ça c’est de l’immobilisme et l’immobilisme amène à un enfermement.


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Adapter ses pratiques agricoles au changement climatique c’est accepter et agir aujourd’hui au lieu de sauver le passé ?

Nous ne pouvons pas tout maîtriser mais ce que nous pouvons faire, faisons le bien. Comme beaucoup de système, le connu fait l’assurance d’un quotidien maîtrisé contrairement à l’inconnu. Il faut un peu de courage pour aller vers cet inconnu. Après, on peut rester dans la cage, dans le confort. On peut toujours ouvrir les fenêtres, aérer, changer la déco mais on est toujours dans la cage. La conjoncture n’est pas simple et il y a toutes les peurs qui viennent avec. Mais dès qu’on se laisse la possibilité de découvrir l’inconnu on s’ouvre à de nouvelles opportunités. Néanmoins, il ne faut pas être dans le jugement, changer de système implique des vrais engagements.


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La question de la prédation et notamment du loup fait débat, comment voyez-vous les choses ?

C’est un partage de l’espace. Je n’ai pas eu d’attaque, mais la présence du loup a été signalée. J’ai un Patou et je rentre les brebis tous les soirs car les attaques se déroulent souvent la nuit. En fait, le loup met un coup de pied dans la fourmilière dans un système agricole qui ne va pas bien. Les éleveurs ne sont plus aussi présents avec les animaux qu’auparavant. C’est un système à revoir, mais qui va payer un vacher pour garder ses vaches ? C’est compliqué de salarier quelqu’un. Il ne faut pas minimiser les choses, une attaque d’un troupeau, quel que soit le prédateur, ce n’est pas rien, c’est très impactant pour un éleveur. Une attaque, c’est une peur qui reste pour l’animal mais pour l’homme aussi. Le souci, c’est que nous sommes dans l’opposition en mettant des cases « pour ou contre ». Plus on fragmente les gens et plus il y a conflit, peut-être qu’un jour nous arriverons à l’unité. Pour le moment c'est très difficile. Je préfère parler de solutions que d'oppositions.


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Un mot de la fin ?

Connais-toi toi-même et tu trouveras ton propre chemin. La liberté d'être, l'éveil à soi et aux autres, la simplicité d’être pour une vie simple et vertueuse.

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